De tout temps, femmes et hommes ont aspiré à des nano-colifichets en ADN. Depuis les années 1990, dans la suite des travaux séminaux de Reif, Adleman, Winfree, puis Rothemund et tant d'autres, ils et elles sont exaucés: par une conception astucieuse de mots sur l'alphabet {A, C, T, G}, il est possible d'obtenir des séquences d'ADN dont les interactions ressemblent à de petites tuiles carrées flottant sur un plan discret. Ces tuiles, qui représentent abstraitement les dits complexes d'ADN, portent des couleurs sur leurs quatre côtés —les séquences d'ADN. Telles des coraux sur un récif, leurs concrétions s'agrègent autour d'une graine: chaque fois qu'une tuile passe à proximité d'une position du bord dont le voisinage est propice, elle se fixe au motif et l'agrandit.
Année après année, la sophistication des motifs obtenus par ce procédé d'auto-assemblage s'est sans cesse accrue. Mais d'après une conjecture de Patitz en 2008, le chic du chic, l'assemblage strict de motifs fractals, était réputé inaccessible. Pourtant, il a été approché de plus en plus près, par deux sortes de ruses: soit en enrichissant (le plus subtilement possible) le modèle, soit en approchant (topologiquement toujours plus près) les motifs fractals, jusqu'à deux résultats récents de Patitz et B. donnant chacun un motif fractal et un système pour l'auto-assembler strictement. Deux résultats, chacun à sa manière déraisonnables, par la taille du générateur du motif fractal pour l'un, par celle du jeu de tuile pour l'autre.
Je présenterai le premier de ces résultats et le compléterai par une caractérisation exacte des motifs fractals qui peuvent être auto-assemblés de manière stricte.